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La mort énigmatique de Jean Luc Lagardère

La mort de Jean-Luc Lagardère, le 14 mars 2003, reste un mystère qui ne cesse d'intriguer et d'alimenter les rumeurs. Intriguer notamment par la réaction de la famille à la suite de son décès. Une plainte pour homicide fut en effet déposée. En 2015 un documentaire est sorti qui analyse les circonstances étranges de cette mort. Ses auteurs Gilles Cayatte et Denis Robert utilisent les codes du polar et tentent de dénouer l’énigme entourant cette mort. Le fil conducteur de cette enquête mène aux univers de l'armement, l'aéronautique, la justice, la médecine, les médias, mais aussi l'espionnage, la politique et le monde des courses hippiques. Les passionnés de sport automobile qui ont suivi «l’épopée Matra» ne peuvent restés insensibles au destin tragique de Jean Luc Lagardère.

Une « affaire »

Ces univers couvrent un spectre très large qui induit une analyse complexe. Ils rendent l’«enquête» plutôt compliquée voire à la limite inextricable.

Cette note n’a pas la prétention d’orienter les esprits sur les conclusions de cette « affaire ». Pour l’heure l’interrogation reste en suspens. Pas plus que de polémiquer sur ce sujet délicat et dramatique à la fois. Elle met simplement en évidence les hypothèses retenues. La question donne à réfléchir car le décès de Jean Luc Lagardère n’ a rien de commun, d’évident. Après tout ce temps la quête de vérité autour de la mort de ce patron de presse et chef d'entreprise se poursuit…

Les faits

Fin février 2003 monsieur Lagardère, 75 ans, subit une opération de la hanche dans une clinique du sport. l’intervention se passe bien. Huit jours après, il dîne avec sa femme Bethy et des amis, le couturier Emanuel Ongaro et Marie-Laure de Villepin, l’épouse de Dominique de Villepin, alors ministre des affaires étrangères. En fin de repas il se sent fatigué et regagne son domicile pour se coucher. Le lendemain, sa femme le retrouve paralysé sur son lit dans sa chambre à coucher. Admis en réanimation à l’Hôpital de la Riboisière, Victime d’un oedème massif au cerveau, en quelques jours son état se dégrade et malgré les efforts des soignants il est foudroyé par le mal. le diagnostic annoncé par le chef de service, le Pr Didier Payen, est une encéphalomyélite aiguë auto-immune, un cas jugé rarissime. Les médecins n’ont pu expliqué l’origine de cette encéphalomyélite qui dans ses formes plus communes est provoquée par une bactérie ou un virus. Au cours de son hospitalisation à la Riboisière, aucune trace de bactéries ou virus n’a été mise en évidence.

Rappel de sa carrière

Né le 10 février 1928 à Aubiet (Gers, sud-ouest), Jean-Luc Lagardère a commencé sa carrière professionnelle comme responsable d'études aéronautiques aux Avions Marcel Dassault, il devient le fils spirituel du pionnier de Matra et d'Europe 1, Sylvain Floirat. Depuis son entrée chez Matra en 1963, il a mené bon nombre d'aventures industrielles, financières, politiques et médiatiques françaises. Des missiles au football (Matra-Racing) en passant par l'automobile (production de sportives, de l’Espace, sport automobile, Formule 1 et sport prototypes) qui fit connaître la firme au grand public, le métro (VAL), la radio (Europe 1), la télévision (La Cinq), les magazines papier glacé (Elle, Paris match) ou les satellites, il a investi dans des secteurs très différents et constitué un empire. Ingénieur de formation, Jean-Luc Lagardère avait bâti en quarante ans l'un des groupes les plus puissants du capitalisme français. Celui-ci réalisait un chiffre d'affaires de 13,2 milliards d'euros, dans deux domaines principaux : l'aéronautique et la défense d'un côté, les médias de l'autre. Le groupe Lagardère fut au cœur de la stratégie de défense européenne. Actionnaire d'EADS, avec l'allemand Dasa et l'espagnol Casa, son influence a été déterminante dans la création du géant aéronautique et dans la défense européenne. A ce moment Jean Luc Lagardère est en quelque sorte l’homme le plus puissant d’Europe. Un homme exposé aux influences politico-économiques d’un secteur très sensible qu’est celui de l’armement. Sa filiale Airbus est un des fleurons d'EADS, elle concurrence l'américain Boeing. Son dernier coup d'éclat remonte à octobre 2002, quand il s'adjuge le pôle édition de Vivendi. Il devient ainsi le premier éditeur français, le 3e européen et le 5e mondial. Ce gaulliste historique avait dans cette affaire le soutien du gouvernement. Un des talents de ce grand capitaine d'industrie était de savoir saisir les opportunités. En 1980, il prend le contrôle du premier groupe d'édition français Hachette. En 1981, ce dernier ne coupe pas à la vague de nationalisations, mais Jean-Luc Lagardère parvient à se faire désigner PDG d'Hachette et à rester en fonctions. Le groupe retourne au privé en 1988. Début 90 il se passionne pour le cheval et les courses hippiques. Il reprend un haras à Pont d’Ouilly. Son écurie court avec succès et il dirige la société France Galop qui organise les courses en France. À sa disparition, son élevage passe dans le giron de l'écurie Aga Khan.

Jean-Luc Lagardère a aussi connu des échecs, comme dans le football, avec le Matra Racing dans les années 80, ou l'audiovisuel : l'équipe Bouygues lui souffle en 1987 la chaîne privatisée TF1 puis il engloutit une fortune dans la Cinq, reprise à Robert Hersant, au risque de perdre le contrôle de son groupe. Jean-Luc Lagardère, qui était marié depuis 1993 à la Brésilienne Elizabeth Pimenta Lucas, dite Betty, préparait depuis longtemps sa succession. Son fils unique, Arnaud, né d'un premier mariage avec Corinne Levasseur, est entré dans le groupe en 1986. Ce dernier, peu inspiré par l’armement et l’aéronautique reprend petit à petit les rênes. En orientant son action sur les médias et les loisirs il est loin d’avoir laisser l’empreinte de son père au sein du groupe.

La mort de Lagardère, un malaise qui subsiste

Comment cet homme sportif (tennis – ski), en bonne santé avant son opération avait-il pu décliner de manière aussi fulgurante? Lagardère était un ascète côté tabac, alcool et hygiène de vie. Jean Louis Gergorin, directeur de la coordination stratégique chez EADS, envisage initialement, comme les proches de Lagardère, une maladie nosocomiale, d'autant que la clinique où il fut opéré a été accusée par le passé de négligence. Plusieurs plaintes furent dressées dans les années 90 à la suite de graves infections nosocomiales qui ont provoqué un scandale sanitaire. Comment ne pas penser que l’établissement n’a pas réagi ensuite face à ce relâchement. Lagardère à qui on déconseilla l’établissement prit d’ailleurs les devants en se faisant prélever son propre sang avant l’opération. La perte de connaissance eut lieu huit jours après l’intervention.. Gergorin, l’homme de confiance de Lagardère, effondré par le décès de son patron, ne mâche pas ses mots par la suite. Il suspecte carrément la mafia russed’avoir assassiné le patron de Matra en empoisonnant son sang. Une technique souvent utilisée, selon lui, par les services secrets russes du KGB. Ceux-ci ont coutume d’introduire un staphylocoque dans le sang. Alors que l'autopsie évoque une congestion cérébrale, l'enquête judiciaire qui n’a pu prouver un quelconque acte criminel conclut à une mort naturelle. Comment considérer cette suspicion? Le fidèle collaborateur n’a-t’il pas fantasmé en livrant cette version qui rappelle certains évènements provoqués par «les russes» et reconnus si l’on peut dire de notoriété publique et politique. L’enquête n’a pu apporter la preuve formelle et médicale pour ce qui concerne Jean Luc Lagardère. Les responsabilités de ce dernier liés à la défense européenne pourraient cependant inciter à suspecter un empoisonnement, scénario machiavélique. Le plus triste est de songer que la lumière n’est toujours pas faite autour de ce drame depuis tant d’années. Qu’en penser ? que conclure? Sinon que le destin de cet homme d’entreprise bascula de manière aussi stupéfiante que brutale en ce début de vingt et unième siècle.

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Sources :

Édition du documentaire de 2015: Distribution : Nord-ouest documentaire .

(Il n'existe pas d'édition DVD ni d'accès en VOD à notre connaissance).

En 2021 : «Affaires sensibles» sur France Inter diffuse une émission de 55 mn sur le thème en s’appuyant sur le documentaire précédent. Retrouver l’émission sur : www.radiofrance.fr .

Photos :  1 /  © B.Cahier         2/ © P.Aventurier   

PS

 

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