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gp acf 1906

  • Grand Prix de l'ACF 1906 - à relire

    Théry Brazier 1905.png

    Préambule :

     

    La fin du 19è siècle marque un essor formidable du véhicule automobile. La France n’est pas la dernière nation à disposer de nombre d’initiateurs de projets, les cerveaux bouillonnent de créativité. La compétition technique devient acharnée, les courses entrent dans l’actualité,  il s’agit de confronter ses réalisations. Deux écoles s’affrontent, le moteur à vapeur face à celui mu par le pétrole. Aussi lorsqu’en 1895 la course Paris-Bordeaux-Paris est remportée par Emile Levassor sur sa voiture à pétrole battant les Bollée père et fils à bord d’un véhicule à vapeur, l’affaire est entendue. 41 heures séparent les deux engins! Les moyennes vont rapidement monter : 25 km/h en 1895, 62 en 1902 lors du Paris-Vienne remporté par Marcel Renault. C’est l’époque des grandes courses sur routes ouvertes entre deux villes européennes. Les risques étaient bien sûr nombreux et les accidents proportionnels, les vitesses de pointe commençaient à faire frémir car on approchait les 100 de moyenne. Compte tenu des routes de l’époque et les traversées de villes ou villages, on peut dire que les pilotes d’alors n’amusaient pas le terrain. Les accidents mortels se succédèrent tant parmi les pilotes que les spectateurs. La course Paris-Madrid de 1903 enregistrait 275 engagés et dès le départ le duel entre Gabriel sur sa Mors et la Renault de Marcel est acharné. Marcel Renault va perdre du temps derrière la poussière de quelques concurrents, il cravache mais à hauteur de Payré dans un long virage à gauche bordé d’arbres sa voiture déséquilibrée capote, le mécanicien est indemne mais Marcel, gravement blessé, décède deux jours plus tard. Les autorités arrêtent la course à Bordeaux, elle a fait suffisamment de victimes. L’émoi fut tel que les courses de ville à ville furent interdites suite à ce tragique épisode.

    La compétition va donc prendre un autre visage et l’américain Gordon Bennett met sur pied des courses en circuit fermé permettant d’instaurer une relative sécurité. La Coupe portant son nom prend un tour très international, trois constructeurs de chaque pays producteur doivent être sélectionnés pour concourir. Ce principe n’arrange pas les français qui comptent une quantité abondante de constructeurs. Beaucoup sont privés de course. Jenatzy l’emporte en 1903 sur Mercedes sur le circuit d’Irlande. La France reprend la Coupe Bennett l’année suivante sur le circuit d’Allemagne en la personne de Théry sur Brasier. Ce dernier réitère en 1905 sur le circuit d’Auvergne.

    Beaucoup  de constructeurs français privés de compétition vont faire pression auprès de l’Automobile club de France pour organiser des courses ouvertes à tous…

    Les tractations commencent dès 1905, l’Automobile club de France définit les bases d’une course couvrant 1200 km en deux jours sur un circuit fermé privilégiant plutôt la vitesse qui sera baptisé Grand Prix de l’ACF couru en juin 1906. Les candidatures arrivent des principales régions françaises. Après visites de la commission sportive émergent deux circuits, ceux de la Seine Inférieure et de la Sarthe. Début janvier 1906, les membres éminents de l’ACF tranchent et choisissent le circuit de la Sarthe. Il représente un triangle de 100 km reliant Le Mans, St Calais et la Ferté Bernard. L’un des axes longe la voie ferrée desservant Le Mans, permettant à nombre de spectateurs d’affluer vers le circuit. Le tracé est très rapide, les traversées de Vibraye et St Calais posent un problème de sécurité mais la réalisation de contournements revêtus de parpaings de chemin de fer règlera la situation. Les virages dans les traversées d’agglomération seront protégés côté public par des barrières en bois…                              

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    La course : 

     Le grand jour arrive en cette fin de mois de juin. Tôt le matin les spectateurs convergent en masse en direction de l’événement. Les constructeurs français ont afflué également, reflétant la santé du secteur automobile, ils sont au nombre de dix : Lorraine Dietrich, Brasier, Grégoire, Panhard et Levassor, Renault, Gobron-Brillié, Vulpès, Hotchkiss, Darracq, Bayard-Clément. La plupart engage trois voitures. La participation étrangère est plus réduite mais de qualité, Fiat et Itala pour les transalpins et Mercedes pour l’Allemagne. Les anglais sont restés dans leur île. Les acteurs sont prêts, le décor est posé, les concurrents tirés au sort partiront toutes les 90 secondes. La chaleur va monter au cours de cette première journée de Grand Prix, on frôle la canicule…

    C’est Baras sur Brasier qui cravache en début de course, le revêtement avec la chaleur et les passages des concurrents se dégrade vite. Les pilotes malgré leurs lunettes  souffrent de projections de poussière et goudron chaud. Des incidents mécaniques et accidents émaillent le premier tour, Gabriel casse la transmission de sa Lorraine Dietrich, Hanriot le moteur de sa Darracq et Fabry retourne son Itala. Les crevaisons sont nombreuses, le nouveau système de jante amovible élaboré par Michelin va favoriser les équipes qui ont fait confiance au procédé dont Renault et Fiat. Ce système leur fait gagner beaucoup de temps.

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    Louis Renault choisit la prudence et modère le rythme de ses pilotes. Au troisième tour, Baras connaît des problèmes d’allumage et la Renault de Sizsz prend le commandement devant la Brasier de Barillier qui a pris le relai de Baras troisième. Suivent Teste (Panhard-Levassor), Shepard (Hotchkiss), Clément (Bayard-Clément). Alors que les six premiers tours de cette première journée vont s’achever, 26 minutes séparent  Szisz de Clément et 41 de Nazzaro qui se place en embuscade. Au retour dans le parc fermé, de nombreux pilotes souffrent des yeux, victimes de conjonctivite, d’ulcérations de cornées. Jenatzy sur Mercedes abandonne suite à des brûlures au visage et cèdera son volant à Burton. A l’aube du 2è jour, la liste des compétiteurs s’est amaigrie. La course va se jouer entre Ferenc Szisz, Clément et Nazzaro. Les voitures sortent du parc fermé tirées par des chevaux, aucune intervention mécanique n’a été possible depuis la veille et Szisz va profiter de son avance pour s’arrêter peu après le départ pour réviser  son auto avec son efficace mécanicien Martau qui change les pneus à grande vitesse tandis que le plein d’huile et carburant est effectué. La course est plus limpide qu’au premier jour, les concurrents partent espacés dans l’ordre du classement. Clément adopte un rythme élevé tentant un retour sur la Renault mais les pneus Dunlop de la Bayard souffrent, par trois fois il faut changer d’enveloppes et perdre du temps. Au contraire Nazzaro progresse sur la Renault, équipé aussi du système Michelin, il attaque à outrance. Le revêtement est ravagé en fin de course et les pilotes vont devoir redoubler de prudence. A  ce jeu Szisz gère son avance avec dextérité malgré une alerte coté suspension que Martau va rapidement régler.

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    gp acf 1906

    L’équipage Renault passe la ligne en vainqueur à plus de 100 km/h de moyenne avec une avance de 32 mn salué par Louis Renault et son canotier. Suivent Nazzaro sur Fiat, Clément sur Bayard-Clément, Barillier sur Brasier, Lancia sur Fiat, Heath sur Panhard-Levassor. Ainsi s’achève le premier Grand Prix de l’histoire. Une histoire qui se perpétue, en 2006, Renault a fêté cette année-là cent ans de Grands Prix par une victoire au Championnat du monde F1. On notera que trois constructeurs ont survécu à nos jours : Fiat, Mercedes et Renault qui sont toujours au combat en Grand Prix par le biais de Ferrari pour les transalpins tandis que les français y maintiennent une activité en tant que motoriste. 

    SdS

    Photos: DR/1/ Théry sur Brasier Circuit d'Auvergne Coupe Bennett 1905.

                    2/ Parc concurrents

                    3/  Changement de pneus

                    4/ Szisz-Martau sur Renault, sortie des stands GP ACF1906.

                    5/ La Renault des vainqueurs en route vers la victoire ACF1906