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Poursuite effrénée

                              Grand Prix d’Espagne 1971

 

Le petit monde des Grands Prix  se retrouve dans le parc de Montjuïc en Espagne pour le deuxième rendez-vous de la saison de Formule 1. Mario Andretti mène le Championnat devant Jackie Stewart. L’Ecossais est à la recherche d’une première victoire au volant de sa Tyrrell Cosworth. L’Américain a lui enregistré un succès chanceux en Afrique du sud après la défaillance de suspension subie par Denny Hulme. Ce dernier était en tête à cinq tours  du drapeau à damier... 

Etat des lieux

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Situé dans le cadre enchanteur des hauteurs de Barcelone ce « Monaco espagnol » est une piste très sélective où secteurs rapides et lents se succèdent. Le circuit sillonne dans un parc majestueux, la piste défile au sein d'une architecture royale. C’est la présentation enthousiaste du circuit. Une piste piégeuse bordée des inévitables rails de protection, d’arbres, de trottoirs et réverbères,  agrémentée d’une bosse peu engageante  baptisée « stadium jump » par les anglophones. Le côté anxiogène du site. Le circuit catalan tourne à l’inverse des aiguilles d’une montre et présente des différences de dénivelés conséquentes. L’ensemble fait de cette piste un rendez-vous singulier pour les pilotes qui doivent s’armer d’une belle abnégation au volant pour affronter le ruban de bitume.

Immanquablement  leur mécanique est mise à rude épreuve sur ce circuit. Régler pile poil son châssis est impératif sur ce terrain. Le premier Grand Prix disputé à Montjuïc en 1969 fut le théâtre de sérieux accidents auxquels Graham Hill et Jochen Rindt se tirèrent miraculeusement. Leurs volumineux ailerons se disloquent au passage de la bosse (*). L’anglais en sort indemne et l’autrichien victime seulement, si l’on peut dire, d’une fracture du nez et d'un traumatisme crânien. Huit abandons sur quatorze partants illustrent la difficulté de l’épreuve, terme qualifiant au mieux cette course. En 1970 Jarama prit le relai pour assurer le Grand Prix d’Espagne.

Revue des forces en présence

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1971, les ailerons se font moins ostentatoires et surtout plus solides. Les Lotus (Fittipaldi-Wisell)  tenantes du titre ont peu évolué et sont en difficulté en ce début de saison. Colin Chapman se concentre sur sa 56B quatre roues motrices mue par une turbine. L’évolution des 72 en pâtit. Les Ferrari  ont le vent en poupe, elles ont performé lors de la première course de l’année. Ce sont les 312 B de 70 qui reprennent du service car la B2 est encore insuffisamment au point. Leur régime moteur a été augmenté. La Mc Laren M 19  est compétitive comme en témoigne la course de Hulme en Afrique du sud. Les Tyrrell sont en haut du tableau, Stewart tire l’équipe vers le sommet tandis que Cevert poursuit sa progression. Les Matra sont des concurrentes  sérieuses. Leur V12 a été remanié. Amon, nouvelle recrue de l’équipe française, a retrouvé un co-équipier en la personne de Beltoise qui a récupéré sa licence après le drame de Buenos Aires. La justice italienne le tient encore cependant dans le collimateur. La BRM P 160  est bien née, pilotée par les rapides Siffert et Rodriguez. Les Brabham (Hill-Schenken), March (Peterson-Adamich-Soler Roid-Pescarolo-Beuttler) et Surtees (Surtees-Stommelen) ont encore à faire leur preuve.

Les essais

La hiérarchie issue des essais ne révèle pas de surprise : deux Ferrari, une Matra en première ligne puis une Tyrrell, une BRM ensuite une Matra, une Mc Laren,  une Ferrari. Leurs pilotes pointent dans l’ordre : Ickx, Regazzoni, Amon, Stewart, Rodriguez, Beltoise, Gethin (Mc Laren M14A), Andretti.  Les pilotes Lotus se plaignent de la tenue de route de leur monture. Quatorzième temps pour Fittipaldi et seizième pour Wisell. Des orages ont perturbé ces essais.

La course

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Dans le parc  espagnol un beau soleil accueille les pilotes pour la course. L’horaire du départ est singulier : 11H30. La grille s'établit après le tour de formation, Ickx bondit en tête au baissé du drapeau devant Regazzoni et Amon. Stewart prend le sillage du trio de tête, il est décidé à ne pas s’en laisser compter. Il surprend Amon au cours de ce premier tour puis la Ferrari du Suisse en fin de tour.

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L’Ecossais qui attaque sans retenue se hisse ainsi en seconde position, tenant Ickx en point de mire. Le Belge ne compte qu’une demi-seconde d’avance au troisième tour. Amon s’impose à Regazzoni et commence à le lâcher progressivement. La hiérarchie s’établit, trois hommes survolent les débats. Stewart et Amon tentent de se rapprocher de leur adversaire respectif. La 312 embarque beaucoup de carburant en ce début de Grand Prix. La course prend une nouvelle tournure quand au sixième tour Stewart attaque Ickx qui s’incline.

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C’est au tour du Belge de chasser la Tyrrell. Au trentième tour les positions se fixent : Ickx à 7 secondes, Amon à 15 secondes de la Tyrrell. L’Ecossais commence à connaître quelques soucis de survirage et de freins. Il gère son avance mais Ickx dont la voiture est stable et s'allège grignote du terrain peu à peu. Le belge redonne du piment à la course, au 58ème tour moins de 5 secondes séparent les deux pilotes.

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Ickx bat le record du tour et semble en mesure de contester la suprématie du leader. Un écart de 2,4 secondes est enregistré au tour 70. Dans les secteurs rapides le balai  des hommes de tête entre les rails est impressionnant. Les trois pointures affirment leur art du pilotage. Si la bataille se livre à distance relative elle demeure intense dans une ambiance de résonance qui la rend émouvante... Il reste cinq tours.

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Amon troisième suit mais est maintenant lâché, il ne paraît plus en mesure de lutter avec le duo de tête et semble baisser les bras. Stewart déploie tout son talent pour compenser la dégradation du comportement  de sa monoplace. Ickx fait lui tout son possible pour opérer la jonction avec le pilote écossais. Ce dernier tient bon malgré le forcing mené par son adversaire. A la faveur des doublages de pilotes attardés la Tyrrell franchit la ligne d’arrivée avec 3,4 secondes d’avance. Jackie savoure sa victoire sur le podium en compagnie d’Ickx et Amon. Cela faisait un an qu’il n’avait pas éprouvé cette satisfaction.

La suite de sa saison sera à l'aune de cette course et se soldera par un second titre de Champion du monde. 

*Les fragiles ailerons haut perchés et fixés sur les bras de suspension ont vécu. Ils seront interdits par les autorités sportives dès le Grand Prix suivant à Monaco (69).

PS

Photos: DR

*paru sur "Racing Memories" en mai 2019

                               

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