25 Juillet 1921, la France renoue avec son Grand Prix, le premier depuis sept ans. Il marque le retour tant attendu à la normalité après le désastre de la Grande Guerre. Cette course est un événement sportif automobile international de premier plan.
Le circuit
Le circuit du Mans fut choisi pour la reprise du Grand Prix de l’Automobile Club de France après la première guerre mondiale. Le tracé utilisé en 1911 sert de base. A la ligne droite reliant Pontlieue à Mulsanne fut adjointe une nouvelle portion à l’ouest. Le kilométrage est réduit à 17,26 km. La course sera disputée sur trente tours soit un peu plus de 517 km. Les 24 Heures d’endurance du Mans se dérouleront en 1923 jusqu’en 1928 sur ce même tracé.
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Les forces en présence
L'événement a attiré trois constructeurs de renommée internationale. Il s'agit de voitures britanniques, françaises et américaines. Le règlement limite à 3 litres la cylindrée. L’écurie Fiat déclare forfait pour des problèmes de surcharge de travail et de manque de main d’œuvre. Les allemands sont interdits de course.
Thomas - Talbot-Darracq
Le constructeur STD (Sunbeam-Talbot-Darracq) représente la fusion récente des trois marques. Quatre voitures participeront à la course. Trois d’entre elles étaient les mêmes que celles qui avaient participé quelques semaines plus tôt aux 500 miles d'Indianapolis, la réglementation limitée à 3L de cylindrée étant identique. Equipées de freins avant et arrière les STD diffèrent sur ce point de leur configuration Indianapolis. Elles sont pilotées par Kenelm Lee Guinness (N°4) et Henry Seagrave (N°10). Les pilotes français René Thomas (N°5), André Boillot (N°15) complètent l’équipe. Les STD se présentent sous des livrées différentes sur un châssis commun au moteur 8 cylindres identique. Deux carrosseries Talbot (Guinness-Seagrave) queue inclinée courte en diagonale avec deux roues de secours. Deux carrosseries Talbot-Darracq (Boillot-Thomas) queue pointue type Indianapolis. Les deux autos à carrosserie Sunbeam de Dario Resta et Louis Zborowski ne sont pas prêtes à temps pour la course.
Chassagne - Ballot
La société Ballot fondée par Ernest dont le principal actionnaire est Hispano-Suiza s’est relevée rapidement du premier conflit mondial sous l’impulsion de son créateur. Les Ballot 3L sont équipées d’une queue pointue semblable à celle vue à Indianapolis. Elles sont inscrites pour Jean Chassagne (N°8), Louis Wagner (N°14) et l’américain Ralph De Palma (N°1). Jules Goux courra sur le « petit » modèle 2LS (N°18).
Guyot - Duesemberg
Les américains ont traversés l’Atlantique. Duesenberg engage quatre voitures, leurs pilotes se nomment Jimmy Murphy (N°12), Joe Boyer (N°16) ainsi que les français Albert Guyot (N°6) et André Dubonnet (N°7).
Enfin Emile Mathis (N°3) engage sa voiture éponyme.
La course
Les Grands Prix de l’époque se jouaient « contre la montre ». Les positions de départ sont ainsi tirées au sort. Jimmy Murphy s'est blessé à l'entraînement, il a des côtes fracturées et porte un bandage. Il dut supporter la douleur durant la course. Le circuit avec le passage des concurrents va découvrir des pierres tranchantes. Les crevaisons vont être nombreuses et les arrêts au stand imprévus perturberont l’épreuve. Pour suivre la course un grand panneau de classement va répertorier par numéros les positions des concurrents.
9 heures du matin, 25 juillet, les autos s’élancent en duos par intervalles d’une demi-minute. La bataille va faire rage entre les Ballot et les Duesenberg mieux chaussées que les voitures anglaises.
Murphy et Boyer dominent les premiers tours devant Chassagne et De Palma. Au 7èmetour Murphy pointe toujours en tête tandis que derrière Chassagne va prendre le meilleur sur la Duesenberg de Boyer au 9ème tour.
A la mi-course Chassagne prend la tête alors que Murphy ravitaille. Mais au 17ème tour Ballot perd un élément clé de son équipe, Jean Chassagne abandonne réservoir fendu. Lors de ce même tour le moteur de la Duesenberg de Joe Boyer casse. Ralph de Palma sur la Ballot réalise des chronos rivalisant avec ceux de son compatriote Murphy au volant de la Duesenberg américaine.
Palma - Murphy (cliquer)
Cependant il est de plus en plus handicapé par un embrayage fatigué. Ses relances après les arrêts ravitaillement de fin de course sont laborieuses et De Palma va s’incliner.
Des problèmes de pneumatiques ont particulièrement ralenti l’équipe STD dont les gommes trop tendres souffrent en raison de l’état de la piste. Autre conséquence, une pierre frappa le mécanicien de Seagrave, Jules Moriceau, il va rester groggi pendant un demi-tour ! Les arrêts aux stands se multiplient pour les STD.
Seagrave (Talbot STD)
René Thomas s'est retiré au 24e tour après qu'une pierre ait percé son réservoir d'huile. André Boillot bien que conduisant prudemment dut changer sept pneus en course. Son travail dans les stands est méthodique et rapide mais le temps perdu s’avère rédhibitoire. Il a néanmoins obtenu la cinquième place. Guinness (1) a dû lui changer neuf pneus pour finir huitième. Malgré le fait de devoir s’arrêter quatorze fois pour changer un pneumatique, Henry Seagrave réussissait à atteindre une moyenne légèrement supérieure à 100 km / h terminant à la neuvième place en 5h 08mn 06s.
Jimmy Murphy(2)s’impose malgré un arrêt en fin de course pour réparer une crevaison et remplir son radiateur d'eau percé par une projection de pierre. Il remporte la victoire pour les États-Unis. C’est sa première et seule victoire sur le sol européen. L’américain Ralph de Palma complète la réussite américaine en finissant second sur Ballot tandis que Jules Goux premier français prend la troisième place au volant de sa Ballot. Suivent deux français Dubonnet (3-Duesenberg) et Boillot (Talbot-Darracq).
Jules Goux (Ballot)
Murphy a piloté avec brio et courage en raison de ses côtes cassées. Il triomphe des Ballot françaises. Son équipier Joe Boyer qui rivalisait en performance avec lui a été malchanceux. Ballot prendra sa revanche. Jules Goux remportera le Grand Prix suivant, celui d’Italie disputé en septembre à Brescia.
1-K. Lee Guiness appartenant à la famille des brasseurs est le créateur de KLG Spark Plug Cie.
2-Jimmy Murphy d’origine irlandaise, vainqueur à Indy en 1922, décédera en 1924 lors d’une course disputée à Syracuse dans l’état de New York.
3 -André Dubonnet petit fils de Joseph le fondateur de la marque apéritive, aviateur pendant les deux guerres mondiales, pratiqua aussi le bobsleigh, fut l’inventeur d’un système de suspension vendu à General Motors et s’intéressa avant l’heure à l’énergie solaire à la fin de sa vie. (décédé en 1980)
Classement GP ACF 1921 :
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|
|
|
||||||
Pos. |
no |
Pilote |
Écurie |
Châssis |
Tours |
Temps/Abandon |
|||
1 |
12 |
30 |
4 h 7 min 11 s 4 |
||||||
2 |
1 |
Ballot 3L |
30 |
+ 14 min 59 s 2 |
|||||
3 |
18 |
Ballot 2LS |
30 |
+ 21 min 27 s 2 |
|||||
4 |
7 |
Duesenberg |
30 |
+ 23 min 7 s 8 |
|||||
5 |
15 |
André Boillot (TD) |
STD |
Talbot-Darracq |
30 |
+ 28 min 6 s |
|||
6 |
6 |
30 |
+ 36 min 1 s 6 |
||||||
7 |
14 |
Ballot 3L |
30 |
+ 40 min 49 s 7 |
|||||
8 |
4 |
STD |
Talbot |
30 |
+ 59 min 32 s 4 |
||||
9 |
10 |
STD |
Talbot |
30 |
+ 1 h 0 min 54 s 6 |
||||
Abd. |
5 |
René Thomas (TD) |
STD |
Talbot-Darracq |
23 |
Fuite d'huile |
|||
Abd. |
16 |
17 |
Moteur |
||||||
Abd. |
8 |
Ballot 3L |
17 |
Réservoir |
|||||
Abd. |
3 |
Privée |
5 |
Moteur |
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NP. |
11 |
STD |
Voiture pas prête |
||||||
NP |
Louis Zborowski |
STD |
Sunbeam |
Voiture pas prête |
PS
Photos : DR
* Paru sur Racing'memories en juin 2021