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Daytona 1970, Porsche s'envole

La Porsche 917 est née en 1969. Ce « phénomène », extrapolation de l’homogène 908 sa devancière, fut produit à  25 exemplaires comme la réglementation l’imposait. Elle représentait  à l’époque l’aboutissement de l’offensive de la marque de Stuttgart dans la catégorie Sport. Un début de carrière difficile n’empêchera pas sa progression,  mise au point laborieuse qui l’acheminera vers une insolente réussite.  Avec Daytona 70 débute l' impressionnante série de succès.

 

La présentation de la 917 est l’occasion d’annoncer la couleur. Exposée au salon de Genève début mars 69, elle fait sensation. L’ambition de Porsche se résume quelques semaines plus tard  par un  spectaculaire alignement des vingt-cinq unités requises pour l’homologation de la voiture en endurance.

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(aucune auto n'était en fait fonctionnelle le jour de la présentation, Porsche se mit au travail après). La 917 est gréée de sa  "langheck" (longue queue) pour l’occasion, celle-là même qui va poser de sérieux problèmes de stabilité à haute vitesse. Les pilotes qui vont la déverminer lors des premiers tests se plaignent  d‘une tenue de cap particulièrement aléatoire. L’exercice s’apparente à un essuyage de plâtre en bonne et due forme. L’adoption d’une  «  kurzheck » (queue courte) améliore la situation mais l'excès de portance est avéré. Lors des 1000km du Nürburgring, les pilotes maison lui préfèrent la saine 908. Piper-Gardner prennent courageusement en charge la 917.

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 L’édition 69 des 24H du Mans met en lumière le défaut de la « monstrueuse » 917, son allure belliqueuse cache sa tenue scabreuse  sur la piste. Malgré la vélocité dont elle fait preuve, les pilotes sont à la tâche. Les ingénieurs vont revoir leur copie. La  fin de saison 69  lui vaut tout de même deux succès aux 1000km de Zeltweg et  aux 9H de Kyalami.

Revenons à sa genèse. Le Châssis de la 917 est conçu sur l’exigence de la légèreté. Il est tubulaire, réalisé en alliage léger. Le moteur est un 12 Cylindres ouvert à 180°  refroidi par air, la spécialité de la marque.

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Oserait-on dire qu’on ne s’est pas foulé pour sa conception ? On a repris l’alésage et la course du groupe de la 908. Pour simplifier il est le résultat de l’adjonction d’un « demi 8 cylindres » au 8 cylindres 3L  d’origine. On a affaire au pragmatisme germanique. Pourquoi  redessiner un nouveau moteur alors qu’il suffit de reprendre l’excellente base du propulseur de la 908 ? La cylindrée s’élève donc à 4500 cm3, la puissance tourne autour des  530  CV.

 La saison 1970 va donc débuter après un long épisode de mise au point côté aérodynamique. D’autres postes ont été travaillés, le renforcement des freins, de la boîte de vitesse et la fiabilisation moteur. Sur les conseils de David Piper, l’un des pilotes d’essai les plus assidus, le nouveau capot arrière court s’inspire de celui de la Lola T70.  Le résultat s’avère enfin efficace. La version capot arrière profilé a également été revue pour l’épreuve mancelle.

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                                                                                Ferrari 512S

En ce début de saison 70 un duel prometteur s’engage en Floride pour la première épreuve du Championnat mondial. Ferrari, engagé en 3L avec son proto  en 69  a anticipé  la saison suivante. L’usine a conçu sa 512S en vue de contrer l’offensive germanique. La belle rouge possède des caractéristiques la différenciant notablement de sa rivale. Les variantes se situent au niveau du 12 cylindres, un 5L en V ouvert à 60°, de puissance supérieure (550CV), refroidi par eau. De même Le système de refroidissement volumineux lié au châssis cage acier renforcé par des panneaux alu confèrent à cette voiture  un handicap poids de près d’une centaine de kg. Autre inconvénient, l’architecture moteur de l’italienne la pénalise par un centre de gravité plus haut que celui de sa concurrente.

Enfin la Ferrari  ne s’est pas aguerrie en compétition comme la Porsche qui a bataillé pendant 6 mois sur les circuits. Si la compétition peut apparaître équilibrée en visualisant les deux protagonistes qui ne manquent pas d’allure, les détails de leur conception tendent à desservir l’italienne côté dynamique. Cette dernière  par contre est plus puissante. La piste va bientôt rendre son verdict. 

Sur le continent américain,  la première manche du Championnat Mondial d’Endurance va engager le premier duel italo-germanique.  Chez Porsche  on a mis les œufs dans deux paniers. La récente association avec John Wyer dont l’expérience est précieuse permet à Porsche de disposer d’une seconde équipe en parallèle avec l’usine qui présente une voiture  sous l’égide de Porsche Autriche  avec  Elford-Ahrens  au volant.     

 L’équipe Gulf Wyer engage 2 voitures. Rodriguez associé au méconnu Kinnunen et Siffert-Redman piloteront les 917 K livrée bleue azur.  Dans la même optique  Ferrari  concourt avec ses 512S usine pour Ickx-Schetty , Andretti-Merzario  et Vaccarella-Giunti ainsi que des privées. Le N.A.R.T présente une 512S aux mains de Gurney-Parsons  tandis que la Scuderia Picchio Rosso engage aussi une 512S pour Manfredini-Moretti.  En catégorie Sport  les autres voitures présentes ne sont pas de l’année : Lola T70 et Ford GT 40.

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Côté Sport Prototype 3L,  l’équipe Matra va tenter de damer le pion aux puissantes Sport. Trois  pilotes de F1 et un futur sont aux commandes  des 650 : Brabham-Cevert  et Beltoise-Pescarolo. Dans cette catégorie on trouve de nombreux privés à bord de Ferrari 312P, Porsche 908, 906 2000cc  et une Chevron B 16 1800cc . Les GT et Tourisme forment  le gros du plateau.  Parmi elles les voitures les plus rapides devront se frayer un chemin.  Dans ces dernières catégories les plus performantes se nomment Chevrolet Corvette, Camaro et Porsche 911.

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Samedi 31 Janvier les qualifiés vont s’élancer pour deux tours d’horloge sur le Speedway de Daytona. Pas de surprise aux essais les 917 et 512S ont largement dominé. Andretti-Merzario qui ont arraché la pole et Siffert-Redman  occupent la première ligne devant Rodriguez-Kinnunen et Elford-Ahrens . Suivent les autres 512S. Les Matra 650 sont en embuscade mais avec leur moteur issu de la F1 le problème est de durer. Un bel entraînement pour Le Mans cependant.

 

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Après le tour de lancement, Siffert prend la tête devant Andretti alors que Rodriguez se porte dans le sillage de l’américain. Le mexicain perd un peu de terrain dans la partie routière du circuit mais recolle la 512 sur l’anneau. Il prend finalement le meilleur sur l’américain. Ickx est parti calmement et suit un groupe de protos 3L. Les 512S ravitaillent cinq tours avant les Porsche et Ickx s’arrête aussi pour un problème de roue. Giunti ouvre le premier abandon d’une Ferrari de pointe, il heurte le mur sur le banking et détruit ses suspensions en rentrant au stand. Plus tard Redman équipier de Siffert explose un pneu et perd 15 minutes au stand. La Porsche N°2 prend la tête. Celle de Siffert est ensuite victime d’un amortisseur puis de son embrayage. Rodriguez-Kinnunen augmentent leur avance. Dans la nuit Ickx, gêné par des GT, heurte le mur du banking. Sa voiture trop endommagé abandonne. La Matra de Beltoise-Pescarolo tient une belle quatrième place que des ennuis d’allumage vont gâcher.  Deux Ferrari usine ont disparu et Ickx remplace Merzario sur la 512 usine restante. La 917 «Autriche » casse une suspension qui l’oblige à un long arrêt, une fuite de réservoir la ralentit ensuite.

La longue nuit vaut des soucis pour Siffert, encore un  amortisseur. Andretti s’arrête au stand en panne de feux arrière. Les Matra souffrent, démarreur pour l’une, allumeur pour les deux. Elford-Ahrens finissent par renoncer avec leur fuite. Au petit matin la Porsche N°1 de Siffert casse son embrayage, longue réparation en vue. Rodriguez-Kinnunen, épargnés d’ennuis, mènent alors largement.

Pour l’anecdote  Rodriguez demanda à son équipier de rouler tranquille. Le manager de Wyer le remplace par Redman jugeant Kinnunen trop lent ! Kinnunen qui ne parle pas anglais n’a pas expliqué sa relative lenteur! Après mise au point  les choses rentrent dans l’ordre. Siffert a repris la ronde avec un embrayage neuf et attaque une belle remontée. Les Matra, ralenties par leurs soucis d’allumage vont terminer cependant toutes deux la course (10è -18è). La Ferrari usine restante deuxième après le long arrêt de Siffert-Redman  connaît des problèmes de châssis (les mécaniciens ont dû procéder à des soudures) et d’amortisseur. Pour ces deux voitures, la fin de course va se terminer en sprint. Siffert se déchaîne et va prendre le meilleur sur le fil. 

 

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 La Porshe N° 2  de Rodriguez-Kinnunen triomphe  devant la voiture sœur N°1 de Siffert-Redman. La Ferrari N°28 de Andretti-Merzario-Ickx complète le podium. Au bilan la Porsche 917 a largement dominé cette première manche.

Ferrari remportera  la course suivante à Sebring puis Porsche aura  la mainmise sur le reste du Championnat. La 917 en compagnie de la 908/3 qui remporta la Targa Florio et le Nürburgring coiffent haut la main la couronne mondiale. Porsche récidive en 71, la 917 a subi une augmentation de cylindrée (5 Litres). La règlementation à partir de 72 l’écarte du Championnat Endurance. Elle migrera vers la Can Am, amassant de nouveaux  succès. Ce palmarès élogieux lié à son impressionnante allure feront d’elle une voiture de course mythique.

 

PS

*(publié sur "Racing'memories" en janvier 2018)

Photos: DR

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