Denis Clive ne possédait pas le physique de son emploi. Look de bûcheron, de camionneur besogneux voire de bon père de famille grassouillet, c'est selon. Il paraissait toujours décalé lorsqu'il déambulait dans les paddocks. Loin en effet de l'archétype dans le domaine: jeune premier élancé aux dents longues, cheveux au vent ou aventurier plus mûr aux traits virils ...
Fi des conventions, si le phototype n'était pas en place, le modèle du cliché inadéquat, nous avions affaire à un talent avéré.
Dans sa contrée natale (Nelle Zélande) en 1956 il commença à se frotter au bitume, il y prit vite goût. Denis Clive avait de l'ambition et émigra en 1960 vers l'Europe pour mieux assouvir sa passion.
Formule junior puis Formule 2, il est embauché dans le garage d'un Australien lui aussi expatrié une bonne partie de l'année (1). Les deux hommes lient amitié, ils fuient régulièrement l'hiver boréal pour rentrer chez eux. C'est lors du premier championnat de Tasmanie que Denny s'affirme durant l'année 64 finissant troisième de la série.
Il confirme ensuite en Formule 2 au point que son employeur qui vient de créer une écurie l'embrigade dès 1965 en formule 1. L'homme a gravi finalement les échelons qui l'amènent au pinacle de sa spécialité. Il termine quatrième en France. Une saison complète en 66 assoit sa réputation, DC s'adjuge quatre podiums. Il participe parallèlement au Championnat CanAm.
1967 sera son année, il mène la création de son ami et patron au titre mondial de Formule 1 au nez et à la barbe des vedettes nommées Clark, Stewart, Hill ou Surtees allant jusqu'à dominer son chef de file qui teste souvent de nouvelles configurations techniques trop aléatoires. Non content de ses succès en monoplace il remporte trois victoires en CanAm à bord des robustes et musclés spécimens de couleur orange créés par un collègue compatriote (2).
Denis Clive accède à la notoriété, son style bonhomme, son allure carrée au visage souvent renfrognée, sa dégaine nature, décomplexée dérangerait-elle? Au point de le qualifier d'ours?
Il n'en a cure et poursuit justement son « bonhomme » de chemin. 1968 le voit changer d'employeur en F1, le même qu'en Canam. C'est dans cette dernière formule qu'il va cartonner et s'octroyer le titre tandis qu'il finit troisième du Championnat F1 avec deux succès à son actif en Italie et au Canada.
Le Néo-Zélandais marque le pas en 1969, une seule victoire en F1 lors de l'ultime course de la saison. S'il fait chou blanc en 1970 dans la formule reine, il se rattrape en décrochant un second titre en CanAm.
1971 voit ses performances encore décliner en F1 mais il retrouve le chemin du succès (Afrique du Sud) l'année suivante, troisième place au classement final du Championnat. DC quitte la Canam fin 72, les Porsche y ont commencé leur razzia…
Toujours fidèle à Mc Laren, une pole position (Afrique du Sud) et une victoire (Suède) en 73 marquent sa saison F1 tandis qu'il remporte en 74 son ultime Grand Prix en Argentine. DC raccroche son casque à la fin de cette saison après dix-huit ans de sport automobile, une retraite méritée en somme. Aucun de ses adversaires (à mon humble connaissance) ne put lui attribuer un seul coup tordu, allez savoir pourquoi on surnommait dans son milieu Denny Hulme « the bear » ?
S'ennuyant probablement durant sa retraite en Océanie, Denny reprit du service dans les années 90 au volant de berlines sportives. Le sort voulu qu'il disparaisse au volant, victime d'une crise cardiaque à 56 ans (1992) sur le circuit de Bathurst en Australie.
Vous avez bien sûr reconnu : 1- Jack Brabham / 2- Bruce Mc Laren
Denis Clive (Denny) Hulme : 1936 – 1992 / 112 GP – Champion du Monde F1 1967 – 8 victoires en Championnat du Monde F1 / Champion CanAm 1968 – 1970 /
PS
Photos : DR